Traitement de l’eczéma chronique des mains (ECM)
Le traitement a pour objectif de contrôler l’inflammation, de réduire les symptômes (prurit, douleur, fissures) et de prévenir les rechutes.
Il repose sur une stratégie progressive, allant des traitements locaux aux options systémiques selon la sévérité, la réponse clinique et l’impact sur la qualité de vie.
Traitements locaux
Le traitement est avant tout local, associant dermocorticoïdes puissants et émollients. Les dermocorticoïdes sont efficaces à court terme, mais leur utilisation prolongée est limitée par le risque d’atrophie cutanée.
Une allergie de contact aux corticostéroïdes doit être envisagée en cas d’absence de réponse au traitement.
Chez les patients réfractaires, le tacrolimus topique peut constituer une alternative efficace. Une étude intra-participant a montré que le tacrolimus 0,1 % et le furoate de mométasone 0,1 % étaient tous deux aussi efficaces et bien tolérés (5).
La photothérapie locale (UVB-TL01 ou PUVA) reste une option, bien que contraignante. Dans une étude publiée en 2015, une amélioration a été observée chez 23 % des patients sous UVB-TL01 contre 43 % sous PUVA après 12 semaines (6).
Traitements systémiques
Chez les patients adultes présentant un ECM sévère ne répondant pas à un traitement bien conduit par dermocorticoïdes puissants, l’alitrétinoïne demeure le seul traitement systémique disposant d’une AMM (seconde intention).
Dans une étude randomisée (n = 1 032), les taux de réponse ont été de 47,7 % sous alitrétinoïne 30 mg, 27,5 % sous 10 mg, contre 16,6 % sous placebo. Les formes hyperkératosiques répondaient mieux au traitement (7).
D’autres traitements systémiques peuvent être utilisés hors AMM, notamment la ciclosporine (3 mg/kg/j), qui a montré une amélioration globale bonne ou très bonne chez 60 % des patients contre 31 % sous bétaméthasone topique (8).
Le méthotrexate reste une option empirique : une étude rétrospective (n = 42) rapportait une amélioration chez 37 % des patients (9).
Nouvelles classes thérapeutiques
- Le delgocitinib : une avancée thérapeutique disponible
Le delgocitinib, inhibiteur pan-JAK topique (traitement local), représente une avancée significative dans la prise en charge de l’eczéma chronique des mains.
Deux essais randomisés contrôlés (n = 487 et n = 473) ont montré une amélioration cliniquement significative chez des patients en échec de dermocorticoïdes :
à 16 semaines, le succès thérapeutique était atteint chez 20 % et 29 % des patients sous delgocitinib crème 20 mg/g, contre 10 % et 7 % sous placebo (p < 0,005) (12).Le delgocitinib (crème 20 mg/g) a obtenu une autorisation de mise sur le marché (AMM) européenne en 2024 pour le traitement de l’eczéma chronique des mains modéré à sévère chez l’adulte, et est disponible en France depuis juin 2025 via le dispositif d’accès direct.
Il constitue une alternative non cortisonée pour les patients insuffisamment soulagés par les traitements conventionnels.
Son mécanisme d’action, ciblant les voies JAK1, JAK2, JAK3 et TYK2, lui confère une efficacité sur l’ensemble des étiologies de l’ECM — qu’elles soient atopiques, irritatives, allergiques ou mixtes.
Deux autres classes de traitements ciblés ont récemment émergé :
- Les inhibiteurs de l’IL-4/IL-13, tels que le dupilumab, ont montré leur efficacité dans certaines formes d’ECM à prédominance atopique, mais aucune AMM spécifique à cette indication n’a été obtenue à ce jour.
Une étude randomisée (n = 30) a néanmoins démontré une très bonne réponse chez 70 % des patients traités par dupilumab 300 mg toutes les deux semaines, soit un écart de 37 points par rapport au placebo (10).
- Les inhibiteurs de JAK systémiques (traitement par voie orale), comme l’upadacitinib (15 ou 30 mg/j), ont également montré une amélioration significative dans l’ECM atopique, sans disposer d’AMM pour cette pathologie (11).
Perspectives
Les futures études devront affiner la place respective de ces nouvelles classes thérapeutiques selon le phénotype clinique de l’ECM (atopique, hyperkératosique ou de contact) et comparer leur efficacité réelle à celle des traitements actifs existants.
Sources
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- Diepgen TL, Coenraads PJ. The epidemiology of occupational contact dermatitis.Int Arch Occup Environ Health. 1999;72(8):496–506.
- Ruzicka T et al. Treatment of chronic hand eczema.J Am Acad Dermatol. 2009;60(5):911–926.
- Johansen JD et al. European Society of Contact Dermatitis guideline for diagnosis and treatment of hand eczema.Contact Dermatitis. 2022;86(5):321–347.
- Worm M et al. Management of chronic hand eczema in clinical practice.J Eur Acad Dermatol Venereol. 2020;34(7):1417–1428.
- Coenraads PJ et al. Tacrolimus vs mometasone in chronic hand eczema: a randomized intra-patient study.Br J Dermatol. 2008;159(4):882–887.
- Lindelöf B et al. UVB and PUVA in chronic hand eczema: a randomized study.Acta Derm Venereol. 2015;95(3):316–320.
- Ruzicka T et al. Oral alitretinoin (9-cis retinoic acid) therapy for chronic hand dermatitis.N Engl J Med. 2008;358:2483–2493.
- Granlund H et al. Cyclosporine treatment of chronic hand eczema.Acta Derm Venereol. 2001;81(1):27–30.
- Molin S et al. Methotrexate treatment for chronic hand eczema: a retrospective study.Acta Derm Venereol. 2015;95(2):173–174.
- Halling-Overgaard AS et al. Dupilumab in chronic hand eczema with atopic features: a randomized trial.Br J Dermatol. 2022;187(2):168–177.
- Worm M et al. Upadacitinib in chronic hand eczema: results from a phase II study.Br J Dermatol. 2023;189(3):301–309.
- Saeki H et al. Efficacy and safety of delgocitinib cream in adults with chronic hand eczema: randomized, double-blind, vehicle-controlled phase III studies (DELTA 1 and DELTA 2).Br J Dermatol. 2023;189(1):52–63.
Auteur : Pr Guillaume CHABY, dermatologue au CHU d’Amiens.






