Le traitement du psoriasis par Otezla

Le traitement du psoriasis – Otezla

Le psoriasis est sous-traité

Une étude a montré en 2012 que 142 patients atteints de psoriasis modéré à sévère, pour qui seul un traitement par voie générale (ou systémique) peut soulager, devaient attendre au moins 2 à 3 ans avant leur prescription, malgré leur demande d’un traitement efficace.

Les années passent mais le constat ne s’améliore pas. Il n’est pas rare de voir des patients très atteints ayant renoncé à se traiter depuis des années devant les faibles résultats des traitements locaux ennuyeux à appliquer qu’on leur propose à chaque consultation.

Or, « les traitements systémiques sont pratiquement sans danger si on respecte les règles d’utilisation »  (Pr Dubertret). Et nous ne manquons pas de traitements systémiques efficaces de nos jours.

L’OTEZLA® (nom commercial de la molécule aprémilast) est un des derniers arrivants dans la panoplie des traitements. Il est commercialisé depuis l’automne 2016.

Il s’agit non pas d’un immunosuppresseur (qui diminue un peu l’immunité donc les défenses antiinfectieuses notamment), mais d’un immunomodulateur qui régule des molécules importantes dans l’inflammation responsable des plaques de psoriasis.

L’Otezla est indiqué chez l’adulte atteint de psoriasis en plaques modéré à sévère en échec ou intolérance ou contre-indication aux autres traitements systémiques conventionnels dont la ciclosporine, le méthotrexate ou la PUVAthérapie (on peut ajouter le Soriatane®). Il se place donc après un premier traitement systémique.

Il peut être initié par un dermatologue de ville sans passer par une première prescription hospitalière.

L’Otezla a une autre indication : le rhumatisme psoriasique quand le traitement de fond (le plus souvent le Méthotrexate) est insuffisant, en association à ce traitement de fond.

La dose prescrite est progressivement croissante sur 6 jours pour arriver à un comprimé matin et soir de 30 mg.

Les études cliniques portant sur 1257 patients volontaires ont montré une bonne efficacité dans seulement 30 % des cas donc inférieure à celle du Méthotrexate ou des biothérapies, son efficacité est voisine du Soriatane®. Mais il faut dire qu’il s’agissait dans ces études de psoriasis particulièrement sévères et de deuxième intention de traitement, toutes conditions particulièrement difficiles pour obtenir de bons résultats.

 Il agit assez lentement et il faut au moins 4 mois pour juger de son efficacité.

Par contre il est apparu dans les études plus intéressant dans des localisations difficiles répondant plus ou moins bien aux autres traitements comme le cuir chevelu, les ongles (65% de bons résultats à un an) et psoriasis des paumes des mains et des plantes des pieds.

Sa tolérance est réputée très bonne.

Il n’a pas de contre-indication sauf la grossesse mais la molécule s’élimine vite en 2 jours et la poursuite de la contraception en cas de projet de grossesse est donc très courte.

Il n’y pas de bilan biologique ou radiologique à faire avant ou pendant le traitement.

Les effets secondaires constatés pendant les études cliniques ont été digestifs sans gravité (diarrhées et nausées) dans 15% des cas. Ils peuvent faire interrompre parfois le traitement mais le plus souvent ils s’estompent d’eux-mêmes en 15 à 30 jours. Des pertes de poids d’en moyenne 2 kg sont observés dans 5% des cas. Tous ces effets secondaires disparaissent à l’arrêt.

Après la sortie du traitement, une alerte de pharmacovigilance (surveillance des traitements après la commercialisation par signalement des médecins) a attiré l’attention sur des possibles effets dépressifs avec 65 dépressions majeures apparues chez 105.000 patients avec 5 suicides et  des recommandations ont été lancées pour éviter ce traitement chez les patients dépressifs ou ayant des antécédents de dépression sévère et de prévenir les patients de se méfier d’un changement d’humeur inhabituel. Mais il faut savoir qu’en France spontanément on enregistre 16,2 suicides pour 100.000 habitants…

Depuis la commercialisation plusieurs études « en vraie vie » ont été publiées parfois un peu discordantes mais globalement l’efficacité semble tourner autour de 30 à 40 % pour obtenir un bon résultat. Les effets secondaires digestifs semblent plus fréquents que dans les essais cliniques avec 28% de diarrhées, 19% de nausées, maux de tête dans 15% des cas, baisse de l’appétit dans 5% des cas et rhinopharyngites dans 10% des cas. Mais aucun de ces effets secondaires n’est grave, ils s’estompent spontanément en quelques semaines et de toute façon disparaissent à l’arrêt et sont contrôlables par des traitements simples que peut vous prescrire votre dermatologue.

Par contre si on vous l’a prescrit et que vous n’avez pas été parmi ceux qui obtiennent de bons résultats avec ce traitement simple qui ne demande aucun bilan et qui consiste à prendre 2 comprimés par jour, ne croyez pas que vous avez « tout fait » et qu’il n’y a plus d’espoir pour vous. Nous avons beaucoup d’autres traitements efficaces et globalement bien tolérés dans notre panier thérapeutique.

Auteur : Dr Josiane Parier – dermatologue mixte

Hôpital Saint Louis Paris et dermatologue libérale à Saint Maur des Fossés, membre de ResoPso

29 octobre 2018